sarrasines, jusqu' à ce que Rome
y eût appelé une nouvelle race française, la
maison d' Anjou, qui vint, comme autrefois les
preux normands, garantir l' indépendance de l' église,
et fermer aux infidèles cette porte de l' Europe.
Mais si l' historien catholique est forcé de lutter
contre une certaine tristesse dans son jugement sur
l' Italie, il ne trouve dans l' Espagne du
treizième siècle que l' objet d' une admiration sans
mélange. C' étaient alors sous tous les rapports
les temps héroïques de cette noble nation, les
temps où elle méritait de conquérir, en même temps
que son sol et son indépendance, le glorieux titre
de monarchie catholique . Des deux grandes
divisions de la péninsule, l' Aragon nous montre
d' abord, après ce roi Pierre Iii que nous avons
vu tenir volontairement sa couronne d' Innocent
Iii, et cependant mourir en combattant l' église à
Muret, son fils, don Jacques-Le-Conquérant, qui
avait pour reine une soeur de sainte élisabeth,
qui mérita son surnom en enlevant aux maures
Majorque et Valence, qui écrivit comme César
sa propre chronique, et qui, pendant
soixante-quatre ans de règne et de combats ; ne
fut jamais vaincu, gagna trente victoires, et fonda
deux mille églises. En Castille, le siècle s' ouvre
sous le règne d' Alphonse-Le-Bref, fondateur de
l' ordre de saint-Jacques et de l' université de
Salamanque, ces deux gloires de l' Espagne ;
appuyé sur cet illustre Roderic Ximenès,
archevêque de Tolède (1208-1215), digne précurseur
de celui qui devait, deux siècles plus tard,
immortaliser ce même nom ; il était à la fois,
comme tant d' autres prélats de ce temps, guerrier
intrépide, profond politique, prédicateur éloquent,
historien exact et aumônier prodigue. Ce roi
et ce primat furent les héros de la sublime journée
de Las Navas De Tolosa (16 juillet 1212), où
l' Espagne fit pour l' Europe ce que la France
avait fait sous Charles Martel, ce que fit plus
tard la Pologne sous Sobieski, où elle la sauva
de l' irruption de quatre cent mille musulmans qui
la prenaient à revers. L' empire du croissant fut
brisé à dater de cette glorieuse journée, véritable
type d' une bataille chrétienne, consacrée dans la
mémoire du peuple par des traditions miraculeuses,
et que le grand Innocent Iii ne crut pouvoir
dignement célébrer qu' en instituant la fête du
triomphe de la croix qui s' observe encore
aujourd' hui à pareil jour en Espagne. à Alphonse
succède saint Ferdinand, contemporain et
cousin-germain de Saint Louis, et qui ne dérogea
point à cette illustre parenté, puisque comme
Louis il réunit toutes les gloires du guerrier